Stay alive, stay alive for me ~ Gaenae.

Dimanche. Jour de repos, pas de boulot. En général, le dimanche, je me plonge dans mes livres et n'en sort plus. Depuis que je travaille à la librairie, j'ai adopté un goût prononcé pour la lecture. Les livres me permettent de m'évader, d'oublier un peu mon quotidien. Lorsque je lis, mon cerveau n'est happé que par les mots. Ainsi je reste concentrée et ne fait pas attention à ce qu'il peut se passer à côté. Parfois on peut me le reprocher, mais je sais que si je le fais c'est aussi pour m'éviter mes crises. Éviter de réveiller ces trois démons qui me tourmentent depuis mon enfance. Je suis installée sur le canapé, le nez plongé dans un classique. Selon Andrew, la lecture est aussi un très bon exercice pour faire abstraction de la maladie et m'efforcer à imaginer d'autres personnages le temps de la lecture, puis les effacer lorsque le livre est posé. En parlant d'Andrew, celui-ci qui était jusqu'à présent en train de travailler sur la table du salon, regarde l'heure et se lève. Ce matin, il m'avait annoncé que je n'avais plus assez de tranquillisants. La pharmacie de garde n'ouvre qu'à partir de 15h30. C'est l'heure. Andrew me regarde, me sourit. Mais je n'y fais pas attention, car cette dernière est occupée par le bouquin que je tiens entre mes mains. Au son de mon prénom, je relève la tête et l'observe. Il m'informe du fait que c'est l'heure et que, afin de ne pas me laisser seule, il va appeler l'un de mes frères. D'abord Alan. L'appel ne dure pas longtemps. Il n'est pas chez lui. Alors il appelle Gaegroir. Et l'appel dure encore moins longtemps. Parfois, je me sens un peu comme une enfant qui a besoin d'être gardée à la moindre absence de ses parents. Mais je ne rechigne jamais. Car je sais que c'est pour mon bien. Et pour le moment, il n'y a que comme ça que je peux fonctionner. Je ne peux pas être seule ne serait-ce que quelques secondes. Car je ne suis pas guérie, car je peux être sujette à une crise à tout moment. Quand mes ennemis se réveillent, ça peut être à n'importe quel moment. Et ça devient le chaos dans ma tête. Crises insupportable, traitement brutal. Les seringues sont les seules à pouvoir me calmer de façon rapide. La douleur de la piqûre est toujours vive et désagréable, mais malheureusement il n'y a pas d'autre solution. C'est ça, ou je risque de me blesser et de blesser mon entourage.
Andrew raccroche. C'est donc Gaegroir qui va venir, Alan s'étant absenté. J'acquiesce doucement avec un léger sourire, puis replonge immédiatement dans mon livre. A peine quelques minutes plus tard, l'interphone se déclenche. Andrew ouvre, se doutant bien qu'il s'agit de Gaegroir. Toutefois, il ne s'absente pas de suite. J'ai beau être calme, on n'est à l'abris de rien. Il suffit de quelques secondes. Souvent, je les vois apparaître devant moi, et ça suffit à me faire flancher. Alors Andrew attend encore un peu, puis ouvre à Gaegroir lorsque ce dernier frappe à la porte. Il le laisse entrer tandis que je lève la tête. Aucun mot entre eux. Quant à moi, je souris légèrement. "Salut." Et je ferme mon livre. Andrew s'approche, se penche et dépose la dernière seringue devant moi, sur la table basse. Je sens ses lèvres venir se poser au dessus de ma tête l'espace de quelques secondes. C'est devenu une habitude. Il me salue, salue Gaegroir, puis s'en va et je le regarde s'éloigner avant de me lever. "Tu vas bien ?" Je demande alors en posant mes yeux sur mon frère. "Est-ce que tu veux boire quelque chose ?"